Nuit chez la Marquise
Manoir de Saint-Cloud, Saint-Prix, Montsoult, Montmorency, je leur préfère celui de Magny en Vexin avec ses hauts murs, poutres anciennes, fenêtres grillagées aux barreaux d’acier, son grand parc boisé avec un petit potager et son verger, le tout encercler d’une forte muraille empierrée.
Qui ne serait pas complète sans l’autre bâtisse du XVe siècle identique, petite chapelle bordée de son cimetière privé, comme dans bien des domaines où des cérémonies se sont déroulées en un autre siècle ou plus récemment dans notre présent.
Capes et capuches noires, enveloppant d’étranges silhouettes venues pour un rituel qui n’est pas de Satan, mais pourrait s’y assimiler car tous deux sont attachés, à des entités dont l’existence est non avérée.
Une épée tenue par un grand Maître d’un Ordre qui n’est pas de Malte, manie les mêmes symboles que les frères d’autrefois qui adoubaient les chevaliers.
Chevalier d’un autre temps dont le sang coule dans mes veines, ma lignée est mélangée à celle d’Aragon, de Castille, la Navarre y prend aussi sa part.
J’en ressens la force, la puissance, qui se régénère les soirs d’orage.
Une flamme brûle en moi, rien ni personne ne l’éteindra.
La confrérie a tenté mon esprit sans pour autant l’attraper.
Un besoin de liberté de compréhension, d’action ne peut exister dans une cage aux barreaux soudés, sans possibilité d’interagir avec le monde extérieur.
Tout acte de sédition est fortement réprimandé, sanctionné sur une croix cloutée, séance fouettée par des mains agiles et déterminées.
Mon épée et chevalière sont auprès de moi pour mon éternité, d’aucun ne pourra soumettre mon corps, sans devoir mettre le sien en contact avec ma double lame bien acérée.
Cette époque me semble lointaine et pourtant proche de la veille au soir.
Gentes dames et petits messieurs, faites place à Mme la Marquise.
Courbettes et révérences sont de mise.
Pour les messieurs, le baiser de son pied est demandé, tout refus sera compris comme soumis d’office, dit ainsi cela peut porter à confusion pour ceux et celles qui ne sont pas de sa maison.
Je vais aller m’aérer dans ce grand parc, trousser quelques jouvencelles, leur retirer bretelles et porte-jarretelles.
Qui sait une pourrait bien aimer se soumettre à ma volonté, par un soir de lune dorée sous la grande voûte étoilée.