Depuis quelques temps, je couche sur le papier ma prose pour un autre que moi, installé à des milliers de kilomètres de là.
Nous joutons par mots interposés, mis en forme, à donner vie à nos pensées, nos fantasmes, y mêlant aussi une partie de nos vies, rendre plus croustillants nos récits.
De petits être de noir vêtus, hantent son ordinateur, à le dévorer pendant la nuit, torpeur de sa réalité bien agité, qui interfère avec la mienne, noire comme un polar, qui se cache pour n’être dévoilée.
Nous voici transposés sur un grand échiquier immatériel, deux Maîtres Chevalier se disputent l’encrier, se fouettent l’esprit à défaut de pouvoir le concrétiser.
Mes strophes matinales tracent leur sillon, par mon télécopieur fatigué, d’être utilisé de cette façon, à débiter chaque jour, son tas de papier plissé.
J’expédie mes folles histoires littéraires, par carte fax informatisée, évite de noircir des pages avant de les jeter.
Mon petit roman d’éducation érotique commence à prendre forme, il attise la convoitise d’un autre regard, tant par mes écrits, que par ses émotions ressenties.
Par un soir de septembre, une gente dame m’est présentée, au bras de son mari et lecteur de mes écrits, pour discourir sur ma folie extraordinaire.
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Les jours et pages passent, sans se retourner, pour se fixer un jour de janvier, le compagnon de cette étrangère me fait mander, bien vouloir égayer le quotidien de sa belle.
Elle est bien jolie cette rouquine, petits yeux pétillants, tout sourire pour cette coquine.
Nous allons au marché des Puces, faire des emplettes, trouver quelques effets en cuir qu’elle désire me faire porter, mon look ne lui plait pas.
« Chris tu es trop strict, laisses-toi un peu aller, viens on va s’amuser ».
Son attention se porte sur un poignet de cuir qu’elle me pose sur le séant, un collier de chien orné de pointes, font danser ses petits yeux de désir.
« Que nenni, tu ne m’attacheras pas à toi comme ça ».
Belle journée pour aller s’enfermer dans une salle sombre, Pasolini en tête d’affiche pour cette petite salle intime où peu de spectateurs se sont installés.
Ma belle rouquine savoure les premiers plans, tout en me labourant le dos de ses ongles cassants, espérant m’extirper un cri puissant
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Le confessionnal l’attire pour y déverser ses pêchés du moment, bien nombreux parfois, elle ne recherche pas à se faire pardonner, la punition serait plutôt sa rédemption, être fouettée elle aimerait bien par l’officier du culte, présent lors de sa venue.
Un fantasme d’être prise dans l’action, bien dévêtue en pleine fellation, fesses tendues sur un des bancs proches, de l’officine à confesse. L’abbé surpris, l’aurait puni, sévèrement et bien fermement.
Un peu d’eau bénite pour cette étrange croyante, qui se signe du bout de ses seins.
Cette petite église non sacralisée est parfaite pour nos rites de la soirée, Il fait bien frais sous cette voûte ancestrale, au plus proche du confessionnal, elle se met à nue, munis d’un martinet, mes caresses aujourd’hui seront plus appliquées.
« Tu m’obéis lui dis-je, baisses les yeux quand tu me parles, je ne tolère pas ta rébellion ».
Ses fesses rougissent au passage croisé du petit fouet, les pleurs ont remplacé ses petits cris, qui sont interrompus par l’entrée d’un homme de noir vêtu.
Vous êtes venue profaner ce lieu, une fellation et sodomisation cette fois, seront votre pénitence.
Monsieur, quand à vous, continuer votre office, fouettez la repentante, comme auparavant.
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Mon adorable affole les gens, se promenant nue dans les jardins, la nuit venue.
Ou bien courtement vêtue, sa robe remontée au nombril, montre ses fesses, lorsqu’elle se baisse.
Dévêtue sur cette petite chaise, sous le porche de ma maison, où nous passons de longs moments à nous caresser charnellement.
Balade dans le parc en soirée, pour rencontrer un vieux peu ragoutant, qui se régalera de la voir ainsi peu vêtue, souhaitera la prendre presque nue.
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Le ciel bleu de décembre fait place à la nuit, sur notre trajet qui nous conduit, à mon antre caché à la lisière d’une forêt, où les cerisiers fleurissent, protègent de la vue mon petit nid douillet.
Le feu crépite dans l’âtre de la cheminée, réchauffant ma demeure isolée.
« Qu’il fait bon d’être ici, loin du bruit et des regards, tous les deux ensemble ».
Un cœur à corps qui pourra durer sans s’apaiser, rire, pleurer, se désirer, se caresser.
Prenons des forces avant de nous livrer totalement à des rituels ensorcelés.
La table est assemblée sur le sol frais de la chambre à coucher.
Non loin du grand lit moelleux et de ses montants en osiers où sont noués quelques liens bien tressés.
Ma tendre croque de petits fruits tout en me souriant.
« Toi tout à l’heure, entre mes doigts ».
Aucune crainte à avoir, nous ne serons pas dérangés, la porte d’entrée bien épaisse est défendue par ses trois verrous, arrêterait un troupeau de buffles enragés.
Sa beauté féline se détache de la lueur du palier, un feu intense commence à la gagner.
Tendres baisers enflammés sur son corps dénudé.
Ma belle, ma muse pour cet instant irréel, froisse les draps de son parfum surnaturel.
Mille baisers sur sa bouche, mes mains sensuelles sur seins en caresses jusqu’au bas de ses reins.
J’enlace ses poignets dans les tresses nouées aux montants en osier.
J’entrevois dans son regard un signe à mon égard
« fais-moi souffrir mon amour, pour que mon âme fonde en toi ».
Ses fines chevilles fortement serrées aux sangles du lit, que j’avais bien préparé avant son arrivée.
Ongles d’acier sur main de velours, font crisser sa peau à son passage, mon gant incrusté de métal glisse, le long de son portail sacré, depuis son pubis à l’orée de sa poitrine, ma muse divine crie dans cette nuit étoilée.
Le métal glacé, entre en fusion à l’encontre du bout de ses seins malmenés par ma langue survoltée.
Une stupeur naît dans ses yeux, aucune crainte, muse aux yeux de braises, ce ne sont que les prémices de notre union sulfurée.
Ma belle, me regarde furieusement.
« Qu’attends-tu pour commencer, je me languis de tes caresses»
Je pose mon gant d’acier sur la couverture de velours et attrape un petit martinet, qui va l’enchanter.
Le chant du fouet claque sèchement dans l’air surchauffé.
Son corps, à chaque passage, tressaille de douleur.
Râles de plaisir s’échappent de ses lèvres, dont les dents mordent, fermement l’épaisse couverture.
Le rituel accélère, changement d’accessoire, feuille de houx en flagellation.
Les gémissements ont remplacé, les cris, au passage entre ses cuisses.
Je ressens la furie de mon double, un peu mutine, qui conçoit sa revanche, entre ses dents.
Lèvres plissées, moue grimaçante, elle n’est point contente.
"Je vais te ravager" me dit-elle "prépares-toi, à recevoir mon mal".
Avant de la libérer, il me faut la soulager, et soigner son corps.
Un baume réparateur, préparé dans la matinée, lui applique.
Massant tendrement, le baume fond, en sa profondeur.
Grand sourire, en place, de sa moue ravageuse.
Merci mon ami, me susurre t’elle, mais cela ne suffira pas, pour calmer ma fureur.
En attendant son désir, allons-nous restaurer un peu dans la salle à manger, le bois crépite encore, dans l’âtre de la cheminée.
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Son sourire fait place, à ses canines blanches, lissées par une langue bien aiguisée.
Ma Maîtresse me fait languir de son doigté, Il est temps de permuter.
Je prends sa place sur le lit, poignets et chevilles attachés.
Elle jubile dans le rôle de dominatrice, trouve le petit chat bien trop doux pour moi.
Un nouveau fraîchement arrivé, aux lanières doublées et coutures soignées, prévu pour marquer et vigoureusement fouetter.
« Ton cuir est bien épais, je vais te le tanner à te faire crier, jusqu’à me supplier».
Je sens sa rage, dans mes revers plus appuyés, mon dos commence à chauffer.
Le premier sang attise son ardeur qui double rapidement sur mon fessier.
Son plaisir se ressent aux murmures qui s’échappent de sa bouche entre deux volées.
« Je ferais de toi mon esclave, prépares-toi à ramper à mes pieds ».